Pour la Grèce, le raisin sec est bien plus qu’un fruit séché. C’est un produit inextricablement lié à l’histoire et à l’économie du pays. Autrefois appelé « or noir », il a participé à l’essor des agriculteurs grecs, avant de les conduire à prendre le chemin de l’étranger par milliers. Enfin, le raisin sec a joué un rôle-clé dans les relations entre la Grèce et la France. Voici l’étonnante histoire de ce produit humble mais si emblématique du terroir grec.
Le grand engouement pour le raisin sec
Dès la création de l’état grec, dans les années 1830, le raisin sec a été le principal produit du pays. Il représentait alors jusqu’à 60% des exportations du jeune royaume qui tentait de se relever après une guerre d’indépendance longue et dévastatrice. L’Angleterre, grand consommateur de fruits secs, en était ainsi la principale destination.
De plus en plus de grecs pauvres se tournaient vers cette culture, relativement facile et ne nécessitant pas de grandes surfaces agricoles. L’état grec les y encourageait en offrant des parcelles aux villageois sans terre. Mais vers 1860, le marché européen était presque saturé à cause de la grande offre de raisin sec grec !
Le malheur des uns fait le bonheur des autres
Vers 1865, le phylloxéra attaque les vignes en Europe de l’ouest et notamment le vignoble du plus grand concurrent de la Grèce : la France ! Aussi, le raisin sec grec connaît une période euphorique de vingt ans : les exportations vont bon train, des entrepôts sont construits partout pour faire face à la demande.
Jusqu’au moment où la production française commence à se redresser et les vignerons français exigent l’arrêt des importations étrangères. En même temps la législation française se durcit. Ainsi, le vin fait à partir de raisin sec doit obligatoirement en porter la mention. C’est le début de la fin pour le raisin grec : le stock ne cesse d’augmenter, les prix sont en chute libre, des émeutes éclatent…
La crise du raisin s’est tristement résolue par l’émigration massive des grecs du Péloponnèse vers les États-Unis, au début du XXème siècle.
Le raisin sec : un produit déterminant des relations France-Grèce
Si le raisin sec est produit en Grèce depuis l’antiquité, ce sont les français qui lui ont donné le nom « raisin de Corinthe ». En effet, la France importait du raisin sec du Péloponnèse depuis le 14ème siècle et Corinthe en était le principal port. D’ailleurs, le mot anglais « currant » est un dérivé du nom français de la ville de Korinthos, puisque les bateaux passaient par les ports français avant d’atteindre l’Angleterre.
Grâce au raisin sec, les français se sont vus attribuer l’exclusivité des fouilles du site archéologique de Delphes ! Celles-ci avaient été l’objet d’âpres négociations entre la Grèce et les nombreuses écoles archéologiques concurrentes. Finalement, la France a proposé des contreparties importantes, dont la baisse des taxes d’importation du raisin sec et remporté l’exclusivité des fouilles du site pour 10 ans.
Le séchage du raisin, une méthode ancestrale
On trouve deux types de raisin sec en Grèce, selon la variété d’origine : le raisin de Corinthe, à petits grains noirs et la sultanine, à grain plus grand et blond, provenant du raisin du même nom. Ce sont des variétés très sucrées, parfumées et sans pépins. Récoltées entre le 15 août et le 15 septembre selon la région et la maturité, les grappes sont étalées sur des filets.
A même le sol, elles sont retournées pour être séchées de tous les côtés pendant 10 jours environ. On recouvre également le raisin de filets ou de tissu, afin de protéger les grains des guêpes et de la moisissure en cas d’orage.
Parfois, les grappes sont accrochées sur des fils horizontaux. Enfin, certains producteurs font sécher le raisin dans des entrepôts fermés mais bien aérés pour éviter l’humidité et les insectes.
Lorsque le raisin est sec, on détache les grains facilement, juste en secouant les grappes.
Le Péloponnèse est le premier producteur de raisin de Corinthe en UE.
A consommer presque sans modération
Très riche en fibres alimentaires, le raisin sec contient des probiotiques naturels, il est réputé pour combattre le cholestérol, l’hypertension artérielle, les infections et les inflammations. Il apporte à notre organisme vitamines A et B, potassium, sélénium et fer. Malgré un taux élevé de fructose, 35% environ, son index glycémique est bas, ce qui signifie que l’absorption du sucre par le sang est lente.
Grâce à ces propriétés longtemps méconnues, le raisin sec a récemment trouvé sa place dans l’alimentation moderne. Ainsi, il entre dans la préparation de nombreux gâteaux secs, barres de céréales, mueslis, salades… Et il remplace avantageusement le sucre dans les yaourts aux fruits, les gâteaux secs ou les cakes.
Où acheter du raisin sec en Grèce ? Comment le conserver ?
A Athènes, dans le centre comme dans les quartiers, on trouve des magasins spécialisés dans la vente de fruits secs. Ils proposent du raisin sec, sultanine ou raisin de Corinthe, en vrac et il est généralement bon et frais. Les marchands autour du marché central d’Athènes en vendent également.
Aux marchés d’Athènes, il y a des producteurs qui vendent du raisin frais et sec, surtout entre août et novembre. Vous pouvez demander à le goûter avant d’acheter. Les grains du raisin sec doivent être moelleux, humides et brillants. S’ils sont durs et cassants, alors le raisin sec est vieux ou mal conservé.
Idéalement, il faut le conserver au frigo ou même au congélateur, afin de garder son moelleux le plus longtemps possible. Si vous n’avez pas la place, mettez-le dans un bocal fermé et y insérez une feuille de laurier. Gardez le raisin sec dans un placard fermé frais et sec.
Le stafidopsomo, recette d’un grand classique grec
Le stafidopsomo, pain aux raisins secs, est plutôt une brioche aux raisins secs… On en trouve dans toutes les boulangeries grecques, il fait partie des encas préférés des grecs.
Voici comment en préparer chez vous :
Ingrédients
Pour 10 petits stafidopsoma :
- 100 gr de raisins de Corinthe
- 1 bol de thé noir très chaud
- 300 gr de farine blanche
- 15 cl de lait tiède + un peu de lait pour dorer
- 10 gr de levure de boulangerie sèche
- 45 gr de sucre roux
- 50 gr de beurre
- 1 œuf
- ½ c à c de sel
- ½ c à c de cannelle
Préparation
1 – Faire gonfler le raisin sec dans un bol de thé noir bien chaud pendant 10 minutes. Puis l’égoutter et le laisser refroidir dans la passoire. Vous pouvez remplacer le raisin de Corinthe par du raisin blond, des cranberries, des pruneaux ou des abricots secs coupés en petits morceaux.
2 – Sortir le beurre du réfrigérateur et le laisser ramollir à température ambiante.
3 – Dans un bol, mélanger le lait tiédi, la levure et une bonne pincée prélevée dans le sucre. Couvrir et attendre 15 minutes que la levure soit activée.
4 – Dans le bol d’un robot mixeur, mettre la farine, le sucre, la cannelle et le sel, verser le mélange lait-levure, puis l’œuf. Mettre le robot en marche en vitesse moyenne et pétrir au crochet pendant 8 mins.
Rajouter la moitié du beurre pommade au mixeur, battre encore 5 mins. Ajouter le reste du beurre et battre 5 minutes supplémentaires.
5 – Hors du robot, incorporer doucement le raisin sec égoutté dans la pâte. Si celle-ci est trop collante, rajouter un peu de farine.
6 – Lorsque la pâte est bien homogène et souple, la retirer du bol, enduire celui-ci avec un peu d’huile d’olive. Remettre la pâte, couvrir avec un torchon et laisser gonfler dans un endroit chaud jusqu’à ce que la pâte ait doublé de volume, soit environ 45 minutes.
7 – Poser la pâte sur le plan de travail légèrement fariné, la diviser en 2 baguettes, puis découper chacune en 5 morceaux. Façonner les pâtons en petits pains oblongs, puis les disposer espacés sur la plaque du four recouverte de papier sulfurisé. Couvrir avec un torchon et laisser regonfler pendant 20 minutes supplémentaires.
8 – Dorer au lait la surface de chaque stafidopsomo. Enfourner à four préchauffé à 200°C pendant 12 minutes environ.
9 – Laisser refroidir avant de déguster vos stafidopsomo au petit-déjeuner ou pendant une pause café.
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Evi S.
En cuisine avec Evi !
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